Beaucoup de bruit pour rien. Si ce n’était aussi dramatique, le titre de la célèbre comédie de Shakespeare pourrait être repris pour définir le Sommet extraordinaire qui a réuni jeudi les chefs d’Etats des 28 pays membres de l’Union Européenne, dont le but était d’apporter des réponses à la crise humanitaire qui se déroule actuellement en Méditerranée. Renforcer la mission de surveillance des frontières de l’Europe – même si les opérations de sauvetages seront élargies – sera finalement la seule mesure adoptée par les dirigeants européens, qui se refusent à ouvrir des routes légales d’immigration par crainte d’un « appel d’air » à destination des candidats à l’immigration. Un manque de solidarité qui se reflète également dans l’abandon d’un programme-pilote de réinstallation des réfugiés selon une meilleure répartition au sein des pays de l’UE. Alors que Bruxelles doit présenter une « stratégie » pour les migrations et l’asile le 13 mai, l’attitude des dirigeants européens n’augure pas de vues nouvelles – pourtant nécessaires pour éviter d’autres drames – sur la question.

A partir du 1er juillet, le Luxembourg assurera la présidence du Conseil de l’Union européenne. Aura-t-il le courage de dénoncer l’immobilisme de l’Union et d’entamer un vaste débat sur une réforme en profondeur des politiques communes d’immigration et d’asile, non pas sécuritaire et répressive, mais respectant les valeurs fondamentales des droits et de la dignité humains ? L’Union européenne doit aider à la stabilisation des pays en proie aux conflits, se montrer solidaire des pays d’arrivée des réfugiés tels que l’Italie et la Grèce et ouvrir des voies légales d’immigration en instaurant des visas humanitaires, système qui permettrait également de lutter contre les réseaux criminels. Sécuriser les frontières est une réponse coûteuse qui contrevient aux droits de l’homme. L’urgence est de sauver des vies humaines.